Contrairement à ce que laisse penser une abondante littérature philosophique, le péché n’est pas l’unique « matrice » de la culpabilité. Le péché provient d’une culture ancienne dans laquelle la responsabilité objective prévalait encore sur la responsabilité subjective. Notre expérience de la culpabilité nous indique une autre voie. Avant d’être un écart à la loi, la culpabilité est un écart à soi, la rupture d’un engagement passé avec soi-même en vue de respecter autrui. Cette hypothèse permet de comprendre le scénario complet de l’innocence au pardon en passant par la tentation, le remords, la honte et le repentir. Elle permet d’y voir plus clair sur les pathologies de la culpabilité. Elle permet aussi, indirectement, d’avancer des propositions constructives dans la question de la culpabilité postcoloniale, en réfléchissant à ce qu’une nation doit aux autres en fonction du regard qu’elle porte sur elle-même. Cet ouvrage répond au projet de libérer ces thèmes de leur pesanteur métaphysique en rationalisant la position des problèmes.
Laurent Fedi, ancien élève de l’Ecole normale supérieure, agrégé de philosophie, est maître de conférences à la Faculté de philosophie de Strasbourg.