La notion de défaillance est essentielle à l’existence humaine. Celle-ci ne pourrait s’apparaître à elle-même si l’excès de son épreuve du réel ne la confrontait à des situations critiques, qui lui confèrent son relief et exacerbent les mouvements de fond qui la traversent. Un corpus restreint de philosophes (Simone Weil, Emmanuel Levinas, Henri Maldiney ou Jean-Louis Chrétien) et une poignée de poètes et artistes (Hart Crane, Josef Sudek, Jean-Luc Godard, etc.) permettent d’établir qu’une faille traverse toute expérience sensible et que notre être au monde doit être compris à l’aune d’un déséquilibre impossible à résorber. Ce constat vient nourrir une philosophie du témoignage et ouvre l’horizon d’une vie en commun susceptible d’accueillir toutes les singularités humaines et de les articuler à une exigence de justice qui irrigue la pensée utopique.

Rodolphe Olcèse est Maître de conférences en philosophie de l’art et théorie du cinéma à l’université Jean Monnet de Saint-Etienne, laboratoire ECLLA. Il est également co-directeur du département de recherche La parole de l’art au Collège des Bernardins à Paris. Il a publié Le Surgissement des archives (2021) et La Vie précaire. Textes et images de Fernand Deligny (2023). Il a codirigé avec Vincent Deville les volumes collectifs L’Art tout contre la machine (2021) et L’Art et les formes de la nature (2023).