La fin de l’Antiquité est plus que l’archétype de la décadence : une relation de synonymie s’est instaurée. Employé absolument, le mot décadence désigne cette époque, les autres lui étant assimilées par métaphore. Il serait donc vain de se demander s’il est justifié de qualifier ainsi ce que les historiens actuels préfèrent nommer “Antiquité tardive”. S’y hasarderait-on, d’ailleurs, que les ouvrages de Montesquieu et de Gibbon seraient opposés au présomptueux. Ces classiques témoignent aussi de ce que la méditation sur le déclin et la chute de l’Empire romain est un des thèmes constitutifs de la conscience occidentale. On n’en peut donc contester le bien-fondé. Mais cette raison même justifie qu’on y regarde de plus près, pour évaluer la réalité de cette décadence sur le rejet de laquelle une large part de nos évidences se sont solidifiées, et aussi pour comprendre ce que l’on voulait rejeter en s’opposant à cela.
Marc Lebiez est philosophe et helléniste. Collaborateur de la Quinzaine littéraire, des Temps modernes, de Critique, il a publié plusieurs livres dont Décadence: Homère et Éloge d’un philosophe resté païen (Proclos), à propos duquel Maurice Sartre a écrit dans Le Monde: ” Avec ce beau livre, Marc Lebiez nous introduit dans le milieu méconnu des derniers païens, fidèles au nom de la raison et de l’histoire aux dieux qui avaient présidé à deux millénaires d’une brillante culture.”