Introduction et traduction du japonais classique par Dominique Thomas
L’esprit libre et novateur de Motoori Norinaga (1730-1801) est unique dans le paysage intellectuel japonais du 18e siècle. Sa critique de l’esprit de système, qui « guide nos sociétés à ce jour et exerce autant de ravages », comme l’a dit C. Lévi-Strauss, est l’occasion d’une remise en cause des perspectives et des certitudes occidentales.
Dès la première page, on bascule dans le monde extraordinaire des récits mythiques, puis l’on traverse l’Antiquité du Japon dans son intimité avec la Chine et la Corée. Par une controverse passionnée avec son contemporain japonais Tô Teikan, Motoori Norinaga découvre le sens propre du mythe et le leurre d’une raison, qui se veut objective, à l’origine de ce que nous aimons croire être l’évolution de la pensée. Le questionnement humain reste le même et soulève les mêmes interrogations aujourd’hui, auxquelles seules les formes, qui y répondent, changent.
Le trait le plus caractéristique de la vie et de l’œuvre de Motoori Norinaga est la constance. Il est issu d’une famille de marchands de Matsuzaka, située dans la péninsule d’Ise. Sur la volonté de sa mère, il part étudier la médecine à Kyôto entre 1752 et 1757, mais par le même temps découvre l’importance des textes les plus anciens par une méthode philologique. De retour à Matsuzaka, il ouvre une clinique de pédiatrie et soigne essentiellement les femmes et les enfants. À la fin des années 1780, son activité de lettré devient prééminente comme l’atteste le nombre important de ses publications entre 1789 et 1792, date à laquelle il perçoit une pension à vie du fief de Kishû (actuel Wakayama).
Ses œuvres complètes, parues entre 1968 et 1993 aux Éditions Chikumashobô, se composent de 23 volumes. Son bâtiment mémorial, situé à Matsuzaka et dirigé par Yoshida Yoshiyuki, présente de nombreuses recherches sous forme de publication dont le dictionnaire Motoori Norinaga, paru en 2001 à l’occasion du bicentenaire de sa mort.