La cité-philosophe dans « Les Politiques » d’Aristote
Alors qu’il n’était pas vraiment apparu chez Platon, le « philosophe-roi » disparaît complètement dans Les politiques d’Aristote. En revanche apparaît pour la première fois celui de « philosophie politique », en un sens bien éloigné de celui d’aujourd’hui, la théorisation abstraite, détachée de la pratique, réservée aux cabinets de philosophes, voire de consultants. La philosophie politique est entendue non pas comme la théorisation que l’on peut faire de la cité, mais l’étude – theoria – que la cité fait d’elle-même, comme une forme d’autoconnaissance, c’est-à-dire une contemplation de la cité par elle-même. Or cela implique que règne dans la cité non pas un personnage aux capacités extraordinaires, le « philosophe-roi », mais une certaine pratique théorique, celle par laquelle les citoyens s’assemblent pour se connaître eux-mêmes directement. Ainsi, même si les critiques qu’il formule de la démocratie ne sont pas négligeables, Aristote fournit avec son Peri politeia, une définition fortement citoyenne de la philosophie politique.
Paul Colrat est normalien, agrégé et docteur en philosophie. Il est l’auteur d’une thèse, à paraître, sur Le mythe du « philosophe-roi » chez Platon.