Responsable éditorial : Lambert Barthélémy
Le rapport que la civilisation occidentale a, dès ses origines antiques, entretenu avec la forêt est construit sur l’opposition, l’affrontement et l’exclusion. La forêt figure l’envers radical, le refoulé du monde de la cité, des règles et des institutions qui structurent la vie des communautés humaines. C’est un espace soumis à la loi primitive de la nature, obscur et sauvage, que sa difficulté d’accès et son absence d’issue semblent soustraire au régime normal du temps : la cruelle Artémis, le fou Dionysos ou le féroce Odin y règnent. Franchir la lisière, c’est passer de l’autre côté du monde : tout s’inverse alors, les sens s’aiguisent jusqu’à l’hallucination, les facultés d’orientation temporelle et spatiale s’évanouissent, les savoirs, les croyances et les identités se défont. D’autres les remplacent, liés à l’exubérance du réel, de la physis.