Essai sur la figure du “musulman” dans les camps de concentration nazis
La figure du « musulman », telle qu’elle a été décrite par les témoins survivants des camps nazis et étudiée par les universitaires, reste problématique. L’origine du terme demeure obscure, et son analyse compliquée par les multiples enjeux que soulève le phénomène concentrationnaire et génocidaire nazi. Figurer l’autre entreprend d’approfondir l’analyse et de clarifier les contours de cette figure. Il en interroge l’exemplarité dans le cadre de la connaissance du fait nazi. Un réexamen des témoignages publiés, ainsi que des dessins des camps, permet d’y déceler les indices d’un univers de représentations qui a pu présider à la formation du « musulman ». À la source de ces processus d’évocation se tient un fonds de visions coloniales et orientalistes auquel puise l’idéologie nazie. Pour qu’une telle imagerie ait pu passer jusqu’aux camps, le mythe nazi doit être lui-même envisagé comme un processus de figuration au terme duquel le réel se conforme à ses représentations jusqu’à produire des figures aberrantes telles que celle du « musulman ».
Paul Bernard-Nouraud est doctorant en Théorie de l’art à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris au sein du Centre de Recherches sur les Arts et le Langage (CRAL). Dernièrement, il a publié Les Ombres solitaires. Essai sur la pièce de théâtre Dans la solitude des champs de coton de Bernard-Marie Koltès, Paris, Pétra, «Usages de la mémoire».