Autour de 1860, le matérialisme renvoie à un danger extrêmement grave : il est accusé d’être la cause cachée de la corruption des mœurs. L’avocat général Joly de Fleury stigmatise le complot d ’ »une société formée pour soutenir le matérialisme, pour détruire la religion, pour inspirer l’indépendance, et nourrir la corruption des mœurs ». Comment le phénomène matérialiste a-t-il pris forme au cours de ce siècle ?
Les courants matérialistes interrogent l’ordre des mœurs et proposent une réforme de la société. Il s’agit, en somme, de changer les mœurs sans renoncer à assumer la civilisation.
Dans cet essai, la recherche historique et l’interrogation philosophique sont donc associées. En précisant et en interprétant la place du matérialisme dans la société française, entre la publication des Lettres philosophiques de Voltaire (1734) et la mort de Diderot (1784), on est logiquement amené à réexaminer le mode d’existence des croyances et des conduites.
Franck Salaün, agrégé et docteur en philosophie, enseigne actuellement à l’Université de Groningue (Pays-Bas).