Les divers matérialismes ont souvent fait de Spinoza leur ancêtre. Mais cette revendication n’est pas possible si elle signifie la déduction de la pensée à partir de la matière. En revanche, si le matérialisme consiste à rapporter au corps tout événement de la vie psychique, affective, Spinoza inaugure un matérialisme inédit, où affirmation de la puissance d’agir et l’affirmation de la puissance de penser sont données en simultanéité.
Matérialisme sans suite, même si le mouvement issu de Marx est celui qui a le moins mal entendu la leçon spinozienne en ce qu’elle unit, dans la même configuration, désir et entendement, force et imagination, éternité et historicité spécifique.
Mais Spinoza ne peut pas d’avantage se couler dans un matérialisme devenu dialectique. Le projet d’un matérialisme de la pratique dans la finitude serait-il l’avenir de la philosophie ? L’ouvrage entend explorer les suggestions inépuisables d’un penser qui saisit l’activité de la libération sans la fétichiser ni la concevoir comme fantasme de maîtrise.
André Tosel, né en 1941, est professeur de philosophie à l’Université de Nice, Besançon. Parmi ses ouvrages, Spinoza ou le crépuscule de la servitude (Aubier, 1984), que cette étude prolonge, Praxis (Editions sociales, 1984), Kant révolutionnaire (P.U.F., 1988), Marx en italiques (T.E.R., 1991), L’esprit de scission (Annales littéraires de Besançon, 1991).
Il a dirigé la publication de divers volumes collectifs aux Annales Littéraires de Besançon : Les logiques de l’agir dans la modernité (1991), Modernité de Gramsci ? (1992), La Démocratie difficile.